Illustration de "La caverne de Platon revisitée par Lacan" par Paul Dussert, Psychanalyste |
"La République" de Platon, l'allégorie
de la caverne garde tout son sens.
Voyons la lecture que l'on peut en faire aujourd'hui :
Au temps de Platon, Socrate raconte :
«
Les hommes vivent dans une caverne depuis leur enfance : ils n’ont rien
connu d’autre. Ils sont enchaînés par les jambes et le cou de sorte
qu’ils ne peuvent tourner la tête et qu’ils ne voient que la
paroi en face d’eux, qui constitue le fond de la caverne.»
En 2023 :
En ce
début de 21ème siècle, les populations vivent pareillement dans une
"caverne aux illusions" depuis leur enfance. Au tout début, le père Noël
occupe une grande place dans l'esprit des enfants. Les gens appellent
cette caverne "démocratie" : ils n’ont rien connu d’autre. Ils sont
enchaînés par des dettes jusqu'au cou, de sorte qu’ils ne peuvent pas
s'échapper de leur labeur quotidien pour prendre le temps de voir le monde
"réel" tel qu'il est... et ils ne voient que ce que leur montre
la télévision.
Dans l'allégorie de Platon :
« La lumière vient d’un feu qui brûle en hauteur derrière eux. Entre le
feu et eux, il y a un muret derrière lequel des objets sont agités et
manipulés par des personnes qui agissent comme des montreurs de
marionnettes.»
En 2023 :
Les informations
viennent sur l'écran de la télévision. Entre les sources d'information et
nous, il y a les oligarques qui détiennent les médias et agissent comme
des montreurs de marionnettes.
Au temps de Platon :
« Ainsi, les prisonniers ne peuvent voir que les ombres de ces
marionnettes projetées sur la paroi devant eux, ainsi que leurs propres
ombres. Ils ne peuvent pas se regarder entre eux, mais ils peuvent se
parler. Ils perçoivent aussi l’écho des paroles des montreurs de
marionnettes qui se réverbèrent sur la paroi, donnant l’impression
que ce sont les ombres qui parlent.»
En 2023 :
Ainsi,
nous ne pouvons voir que les fake news envoyées par ces marionnettes
projetées sur l'écran de la télé. Nous percevons les sornettes des médias
comme étant des vérités, sans se douter que les réalités qu'elles
prétendent décrire sont bien différentes.
Au temps de Platon :
« Un jour, un prisonnier est délivré, puis contraint d’emprunter le
sentier qui mène à la sortie de la caverne, vers la lumière. Il se lève,
se retourne, est d’abord abasourdi puis voit directement les objets
fabriqués et les marionnettes. Quand on le questionne sur ce qu’il voit
vraiment, il est embarrassé. Il a tendance à nier l’évidence
et le fait qu’il ait été si longtemps trompé.»
En 2023 :
Quelques personnes s'échappent parfois de la
caverne aux illusions et
prennent le temps de chercher les réalités que la télé ne montre jamais,
pour alerter les populations
prisonnières des illusions diffusées à la télé. Ces
lanceurs d'alerte sont
immédiatement surnommés "complotistes". D'abord abasourdi par ce qu'il découvre, ledit
complotiste est embarrassé.
Il se met à douter et se demande comment il a pu si longtemps être
trompé par les illusions de sa télé.
Au temps de Platon :
« On l’invite ensuite à regarder vers la lumière qui provient de
l’entrée de la caverne, mais déstabilisé, il a tendance à vouloir
retourner avec les autres prisonniers. On le force à sortir de la
caverne, il éprouve alors une certaine souffrance.»
En 2023 :
Dans un premier temps, ce que découvre le
lanceur d’alerte peut le
déstabiliser et l'inciter à renoncer et à retourner devant sa télé. Il
éprouve alors une certaine souffrance.
Au temps de Platon :
« Il passe la nuit à l’extérieur de la caverne ; il s’accoutume à la
lumière des étoiles et de la lune. Le soleil revient et il parvient à
s’accoutumer à sa lumière. Il finit par accepter la réalité telle
qu’elle est, par comprendre que le soleil est la seule source de
lumière et de vérité.»
En 2023 :
Le lanceur d’alerte
passe beaucoup de temps à rechercher des informations. Il finit par
accepter d'avoir été trompé par sa télé, et à admettre la réalité telle
quelle est. Il comprend alors que la source de lumière et de vérité est
ailleurs que dans sa télé.
Au temps de Platon :
« L’ancien prisonnier repense à ses compagnons et a pitié d’eux. Pour
rien au monde il ne voudrait retourner au fond de la caverne.»
En 2023 :
Le
lanceur d’alerte, surnommé
complotiste, pense à ses
proches restés devant leur télé, et a pitié d'eux. Il se demande comment
les aider à abandonner leurs croyances et découvrir la réalité telle
qu'elle est.
Dans l'allégorie de Platon :
« Mais Socrate dit que dans le cas où il y retournerait, il serait
certainement confronté aux rires et aux dénégations de ses anciens
collègues, et même au fait que certains veuillent le mettre à mort,
persuadés de sa folie.»
En 2023 :
Mais dans le cas où le
lanceur d’alerte cherche à
convaincre ses semblables, il devient "complotiste"... et prend
le risque d'être confronté aux rires et aux dénégations de ses proches,
et même au fait que certains voudraient l'interner en hôpital
psychiatrique, persuadés de sa folie.
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Illustration de "La caverne de Platon revisitée par Lacan" par Paul Dussert, Psychanalyste |
aucune ride depuis plus de 2000 ans.
La forme a changé, mais le fond reste identique…
Pourquoi avons-nous autant de mal à abandonner nos illusions, même après avoir
perdu celle du Père Noël ?
Freud a peut-être apporté un début de
réponse...
Loup Rebel |